15 mars 2006

Retrait du CPE ! Dehors Chirac-Villepin-Sarkozy !

Présentation:
Les contributeurs d'APS étant investis dans la Lettre de Liaisons comme cadre quotidien de collaboration avec des militants ouvriers dans l'activité au jour le jour, nous reproduisons les éditoriaux de ce bulletin après le 7 mars 2006


La Lettre de Liaisons n° 168 du 12 mars 2006
Ce dont dépend la victoire : auto-organisation, généralisation, centralisation.


De Villepin vient de déranger des millions de téléspectateurs en venant sur TF1 ne rien dire du tout, si ce n'est des mensonges. Ainsi, il a encore répété qu'il serait impossible de licencier une femme enceinte avec le CPE, alors que le texte de la loi sur l' "égalité des chances" prévoit le licenciement sans motif. Bien bête serait alors le patron qui viendrait dire "je la vire parce qu'elle est enceinte" !

Il a proposé la "concertation" aux syndicats pour appliquer le CPE et discuter des modalités des décrets d'application. Il est vrai que pour ce faire, il a pu se prévaloir de ce que la "concertation" avait toujours eu lieu, les confédérations étant allées à sa rencontre dés le lendemain de la victoire du Non le 29 mai 2005 : ce qui est vrai ...

Pendant ce temps, des millions de jeunes pensent et se préparent au combat.
Qu'est-ce qui permet pourtant à un De Villepin que tous les médias disent -à juste titre- affaibli (et son gouvernement, et M. Sarkozy, et M. Chirac, avec lui), de manifester une certaine arrogance ?

Ce qui le lui permet, c'est ce dont manque encore trop le mouvement engagé : son auto-organisation, sa généralisation, sa centralisation.

Son auto-organisation : les étudiants ont imposé, de haute lutte -la Sorbonne fut l'enjeu de cette lutte- le droit à des Assemblées Générales démocratique, et réalisé d'ores et déjà de magnifiques AG. Celle des étudiants poitevins, à 4000 dans un stade parce qu'aucun amphi ne pouvait les contenir, restera dans les annales. Les lycéens n'ont toujours pas ce droit élémentaire. Ne parlons pas des apprentis ...
Quant aux salariés, sauf un début parmi les profs du 93 (ou existe une tradition depuis 2003 et même depuis 1998), c'est de la responsabilité des militants syndicalistes, contre la volonté des dirigeants la plupart du temps, d'aller vers de véritables Assemblées générales : des assemblées interprofessionnelles sur les sites et les bassins, et des assemblées de services et d'entreprises.

Sa généralisation : celle de la grève étudiante est en train de se réaliser. Mais la question clef est celle de la grève générale interprofessionnelle. Quoi que fabule Jean-Claude Mailly qui prétend avoir imposé celle-ci le 7 mars, ce n'était pas le cas. Systématiquement, les directions confédérales ont évité tout appel à la grève interprofessionnelle à ce jour et à cette heure.

Sa centralisation : à l'évidence, c'est avant fin mars qu'il faut battre le fer quand il est chaud, qu'il faut réaliser ce pour quoi nous lancions un appel dés le 4 février pour une manifestation nationale centrale pour le retrait du CPE, pour chasser Chirac, De Villepin et Sarkozy, contre l'Elysée, Matignon, l'Assemblée minoritaire, le MEDEF. Ce combat, qui a de l'écho, rencontre les besoins du mouvement engagé. La coordination nationale des étudiants, réunie le samedi 11 mai, pose la question d'une grève interprofessionnelle pour réaliser une montée en masse à Paris le 23 mars (texte reproduit ci-dessous). Une montée en masse ne saurait être une manifestation symbolique, une promenade, mais doit être une montée en masse contre le gouvernement et le MEDEF, dirigée sur les lieux du pouvoir.

Dans ce même appel, on peut lire que l'on peut faire céder ce gouvernement. Cet optimisme fréquent chez les jeunes, qui découvrent leur force et réalisent de grandes choses, a sans doute été quelque peu douché par l'arrogance du sieur De Villepin ce soir. Autant nous pouvons être sévères envers ces grands dirigeants confédéraux qui parlent de "faire reculer le gouvernement" sans vouloir se donner les moyens d'un combat ne reculant pas devant son renversement, autant quand les étudiants disent cela, ceci veut dire que eux n'ont pas peur d'y aller et de chercher l'affrontement politique et social central, pour en découdre. Ils disent qu'ils pensent qu'ils peuvent faire céder ce gouvernement, cela veut dire qu'ils ont le potentiel pour le renverser et le CPE avec lui !

La coordination appelle à des manifestations de masse de la jeunesse le mardi 12 puis le jeudi 16. La confédération FO déclare que, pour elle, le jeudi 16 avec grève passe avant les rassemblements du samedi 18, auxquels elle appelle aussi, avec tous les syndicats. Il faut y être, évidemment et plutôt deux fois qu'une : pour préparer, en aidant à l'auto-organisation, aux assemblées générales, la généralisation et la centralisation.

Mais ce qui s'est passé ces trois derniers jours à la Sorbonne, et aussi dans des dizaines de facs, lycées, lycées professionnels, IUT, montre que le calendrier a commencé à échapper à la procession des "journées" intersyndicales.
La question posée par la coordination est en effet pertinente et fixe une échéance : pourquoi pas, le 23 mars, dans l'unité, la grève générale avec montée sur Paris contre le MEDEF et le gouvernement Chirac-De Villepin-Sarkozy ?

Discutons en dans les assemblées générales, dans les réunions politiques et syndicales, dans les réseaux et forums de discussion.
La Lettre de Liaisons appelle ses lecteurs et camarades à élargir cette discussion en vue de la diffusion massive d'un tract d'ici la fin de la semaine.

Supplément du 10 mars 2006 à la Lettre de Liaisons n° 167.

Vendredi 10 mars. Dans toute la France, c'est une grève de masse des étudiants qui s'affirme. Depuis le début de la semaine, le scénario sur lequel comptait le gouvernement -de petits groupes tentant de bloquer les cours et une multiplication d'incidents- est balayé : de Clermont-Ferrand à Nancy, les AG regroupent maintenant des milliers d'étudiants. La jeunesse est déterminée.

Vendredi 10 mars. Dans toute la France, la police cherche les provocations. Ce matin la Sorbonne a été fermée pour interdire aux étudiants de se réunir en Assemblées générales. Ce sont les AG qui leur font peur, les AG massives avec discussion démocratique et vote conscient dans le silence, les AG qui désignent leurs représentants à la coordination nationale qui se réunira demain, associant les syndicats dans une représentation de l'ensemble des grévistes. Ce sont aussi les AG que l'administration a pour mission d'interdire aux lycéens en fermant les portes pour jeter dehors ceux qui voudraient faire grève. Ce sont des AG dans les écoles, dans les entreprises, dans les localités qui pourraient propager la lame de fond, comme et mieux qu'en 2003 !

Vendredi 10 mars. Le ministre supposé de l'Education nationale, M. De Robien, pour des raisons politiques qui lui sont propres (nécessité de paraître comme un suppôt acharné du premier ministre vu son statut de dernier ministre de l'UDF entrée en opposition), a tenu ce midi sur France Inter des propos provocateurs contre toute la jeunesse. Il a menti grossièrement sur le nombre et la réalité des grèves. Il a osé se servir du drame d'une prise d'otage commise par un enseignant au chômage poussé au déséquilibre mental, hier dans la Sarthe, pour opposer les personnels et les élèves de ce lycée aux mauvais citoyens qui, selon lui, bloquent les cours. Il a justifié les "matraques" à la Sorbonne.

La situation se tend. La classe ouvrière soutient la jeunesse. Ensemble nous pouvons gagner, si nous ne craignons pas de chasser maintenant Chirac, De Villepin et Sarkozy !

La situation se tend, et les organisations syndicales nationales appellent à une nouvelle journée de manifestations le samedi 18 mars.
Nul doute que les salariés seront massivement dans la rue ce jour là. Mais nul doute aussi qu'il est clair comme de l'eau de roche que cet appel vise à éviter la grève interprofessionnelle, la grève générale pour gagner.

Il aurait été possible d'organiser une grève le jeudi 16 mars, jour où la coordination étudiante et l'UNEF appelaient déjà à la mobilisation des étudiants et des lycéens (et où, de plus, les étudiants de STAPS et le syndicat SNEP-FSU des profs de gym organise une montée à Paris contre les suppressions de postes aux concours).

Il aurait été possible d'organiser, dés le 16 mars, une manifestation nationale appuyée et construite par la grève, contre le gouvernement, l'Assemblée nationale et le MEDEF.
Les cheminots ne demandent qu'à transporter une telle manifestation. Les électriciens et les gaziers, appelés le ... 23 mars par leurs fédérations, ne demandent qu'à frapper ensemble avec toutes et avec tous pour gagner !

Alors, oui, pour gagner nous voulons :
La grève générale de la jeunesse !
La grève générale des étudiants, lycéens et apprentis !
La grève interprofessionnelle avant fin mars pour réaliser, avec la jeunesse, une montée en masse à Paris contre le gouvernement illégitime et l'Assemblée minoritaire !

La Lettre de Liaisons. 10 mars 2006, 15h.


Supplément du 9 mars 2006 à la Lettre de Liaisons n° 167.

Un million.


Un million de manifestants, ce qui suppose des centaines de milliers de grévistes : salariés du public et du privé, d'une part, et jeunes étudiants et lycéens car pour eux, il s'agit bien de grève -non au sens d'arrêt de la production, mais au sens de moyen de rassemblement pour le combat, ce qui est le sens premier de toute vraie grève.

Un million, donc, ce 7 mars, malgré le combat anti-grève mené par l'appareil central de la CGT -mais pas, il faut le dire, par "la CGT" si la CGT, ce sont ses militants, ses sections de base, et toutes ses unions et fédérations. En tout cas l'appareil central, qui nous rappelle tous les trois jours par la bouche de Maryse Dumas ou de Jean-Christophe Le Duigou que l'heure n'est pas à la grève générale (alors pourquoi tant insister ??), a par exemple fait en sorte qu'il n'y ait pratiquement pas de grève dans les transports. Imaginons ce qu'aurait été le 7 mars multiplié par l'arrêt des transports en commun ...

Dans ces conditions, ce million est d'autant plus significatif. Il a d'ores et déjà modifié la situation politique sur un point : le rapport de force, y compris dans sa dimension psychologique, entre la classe ouvrière et les jeunes, d'une part, et le gouvernement d'autre part, s'est modifié, De Villepin est "affaibli" et ne bénéficie plus de la victoire qu'il avait remportée cet automne contre les grévistes de la SNCM et de la RTM à Marseille. Attention : pour ce qui est des attaques contre le droit du travail, contre la démocratie et contre les services publics, cela n'a pas pour effet de les ralentir, mais de les accélérer dans la fuite en avant qui est la marque de ce gouvernement.

Pour reprendre l'expression des journalistes, De Villepin se "raffarinise". Attention à bien comprendre ce que cela veut dire : après les grèves de 2003, Raffarin était politiquement usé mais il avait fait passer la loi Fillon contre les retraites. Or, le problème pour les salariés et pour la jeunesse n'est pas de "raffaraniser" De Villepin, il est de faire abroger le CPE et le CNE et à partir de là, après avoir ainsi empêché patrons et gouvernement de créer l'irréversible, de remettre en cause toutes les attaques anti-sociales de ces dernières années.

Pour imposer le retrait du CPE, la revendication unitaire reprise par tous, on ne peut donc pas auto-limiter les objectifs de la lutte au fait de "faire céder le gouvernement", ainsi que le disent toutes les forces politiques nationalement constituées de gauche et d'extrême gauche, sauf exceptions ... mentionnées dans ce bulletin !

Car, qu'est-ce qui a fait peur aux gouvernants dans le 7 mars ? Le million de manifestants malgré la pression anti-grève des dirigeants, certes, et la perception de la lame de fond dans la jeunesse ouvrière scolarisée ou semi-scolarisée, celle dont les médias parlent le moins -lycéens professionnels et agricoles, apprentis. Et sur cet élan le passage à des AG étudiantes massives. Plus de 1000 en AG à Nancy, c'est historique. Au moment où, curieusement, les chaînes de télés commençaient à valoriser une Julie Coudry, liée à la CFDT, "étudiante modérée" s'opposant aux blocages de facs par l' "extrême gauche", apparaissent des AG massives, pas minoritaires : la manoeuvre est donc ratée ! Donc, ce qui a fait peur aux gouvernants le 7 mars, c'est la réalité d'une vague qui est dirigée frontalement contre eux.
Nul doute qu'un appel intersyndical à la grève pour permettre de monter en masse à Paris contre le gouvernement, l'Assemblée, le MEDEF, serait entendu. Au passage, les syndicats de cheminots pourraient permettre la montée gratuite en masse !

Voila ce dont les dirigeants ne veulent pas. Et comme ils ne veulent pas, ils délèguent aux jeunes, à leurs risques et périls -ceux d'une grève longue mettant en cause leur scolarité- la mission de "faire masse".

Etudiants et lycéens ne sauraient être les grévistes par procuration des directions confédérales. Oui, la grève générale de la jeunesse peut et doit se construire : elle le peut et elle le doit en cherchant l'affrontement avec le gouvernement, en cherchant à se centraliser contre lui et à appeler les salariés avec elle. C'est la discussion qui est maintenant à l'ordre du jour : va-t-on passer le mois de mars de "journées" en "journées" en évitant la double question des grèves véritables dans les entreprises et de la montée, en semaine, à Paris, contre le gouvernement et pas pour se promener ? Voila les questions posées.

Beaucoup posent la première partie de ces questions : après le 7 mars, qu'est-ce qu'on fait ? La mobilisation doit avoir un lendemain, pourquoi pas reconduire la grève, etc. Mais s'en tenir à cela ne répond pas au problème : c'est toujours aller de "journées" en "journées" (comme l'illustre le communiqué ci-dessous d'une AG enseignante tenue à Paris le 7 mars, avec des délégués de plusieurs collèges du 93). Prochaine étape le 16 mars ? Bien sûr, OK, évidemment, of course : on va agir pour la grève et la manif le 16 mars, mais il faut un plan de combat : où va t'on ? Comment va-t-on vers la grève effective des salariés et la montée centrale sur Paris ? Car il s'agit bien de vaincre, n'est-ce pas, pas de "lutter et encore lutter" ? Nous ne sommes pas pour des semaines, des mois et des années de lutte ! Nous disons que nous avons la force de vaincre, maintenant : c'est une question politique, une question d'organisation !

Le mouvement en cours n'est-il pas déjà arrivé à "raffaraniser" De Villepin ? Et ce faisant, il affaiblit aussi Sarkozy qui espérerait pourtant prendre la relève. C'est donc que le mouvement engagé a la force de chasser Chirac, De Villepin et Sarkozy !

Source : http://site.voila.fr/bulletin_Liaisons/index.html

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