31 décembre 2005

Après les émeutes de Cronulla, solidarité contre le racisme

Environ 150 personnes ont participé au rassemblement de King George Square à Brisbane, ce 18 décembre, pour protester contre les émeutes racistes qui ont eu lieu le 11 décembre à Cronulla, une banlieue de Sydney en bord de mer, quand 5000 personnes blanches, jeunes pour la plupart, ont envahi les rues, brandissant des drapeaux australiens et attaquant quiconque avait un aspect moyen-oriental.

La taille de ce rassemblement anti-raciste, le dernier dimanche avant Noël et par une chaleur de fournaise, était encourageante ainsi que le fait que la plupart des participants étaient jeunes. A Sydney, selon un rapport téléphoné au rassemblement, prés de 5000 personnes ont protesté (1000 selon la police).

Tous les groupes socialistes étaient présents à Brisbane : le DSP, Socialist Alternative, Socialist Action Group, Solidarity, Workers’Liberty, excepté l’ISO.

Deux choses m’inquiètent. Bien que la plupart des orateurs soient socialistes, la plupart d’entre eux ont fait appel à « la communauté australienne » pour rejeter le racisme, plutôt qu’à la solidarité de la classe ouvrière. Le discours de Mark Gillepsie de Solidarity a constitué une exception.

Socialist Alternative avait une pancarte dénonçant « L’Australie anti-musulmane de Howard », pas « l’Australie raciste » mais « l’Australie anti-musulmane », et Meredith Rose, qui présidait le rassemblement, annonça que notre deuxième orateur, après un mot de bienvenue en terre aborigène par Sam Watson, délivrerait « une prière musulmane ». Effectivement, l’orateur suivant nous adressa un « salaam alaikum » puis quelques mots de soutien « en tant que musulman australien » ; mais nombre des autres orateurs insistèrent sur le soutien « à la communauté musulmane ». Deux ou trois d’entre eux sentirent l’obligation par anti-racisme d’insister sur le fait qu’il n’y avait rien de sexiste à propos de l’Islam.

Quand j’ai pris la parole, j’ai souligné que les racistes avaient visé des gens parce qu’ils avaient l’air du «Moyen-Orient » qui n’est pas bien différent de celui de nombreux demandeurs d’asile envoyés dans les centres de détention ou déportés à Nauru par John Howard, sans distinction entre ceux qui sont musulmans, athées ou chrétiens. Nous ne devons aucune solidarité envers l’Islam ou tout autre religion.Nous devons une solidarité envers des êtres humains attaqués par des racistes, quelque soit leur croyance religieuse ou leur non croyance. Si j’avais eu plus de temps, j’aurai ajouté que :

1) Selon tous les rapports, la première cible des racistes était les Australiens d’origine libanaise. Identifier les Australiens d’origine libanaise avec « la communauté musulmane » est inapproprié pour au moins deux raisons. Une enquête réalisée par SBS parmi les Australiens d’origine libanaise donne seulement 55% de musulmans, 29 % de chrétiens (et probablement 16% de sans religion). Elle ne trouve « qu’une très légère et non significative différence dans l’insatisfaction personnelle (expériences du racisme) entre Libanais chrétiens et musulmans ». A Brisbane, je pense que la majorité des musulmans sont originaires de Bosnie ou du Kosovo.

2)Même lorsque la religion est le marqueur servant effectivement à identifier une communauté qui subit une oppression et des discriminations, les socialistes et les démocrates peuvent défendre cette communauté sans pour autant défendre la religion. Et nous devons agir ainsi si nous voulons rester fidèles à nos principes humanistes et construire un puissant mouvement contre l’oppression, plutôt qu’une série de plaidoyers particuliers pour chaque groupe religieux supposé mériter notre amitié selon les mérites attribués à leur religion. Le soutien à la communauté catholique opprimée en Irlande du Nord ne trouverait aucune aide auprès de socialistes prétendant que le catholicisme n’est, après tout, pas si mauvais sur le droit à l’avortement, les droits des enfants et le divorce.

3) Pourquoi des groupes comme Socialist Alternative, Socialist Action Group et Solidarity qui sont issus de scissions avec le cœur de la tendance politique internationale dirigée par le SWP en Grande Bretagne pour des motifs organisationnels, ne reconsidèrent-ils pas la politique réelle de cette tendance ? Pourquoi reproduisent-ils de façon acritique de telles folies que le « tournant islamique » du SWP ?

Martin Thomas
le 18 décembre 2005

Martin Thomas est intervenu au rassemblement de Brisbane en qualité de porte-parole de Workers'Liberty. Son compte-rendu de cette manifestation est paru sur le site de l'Alliance for Workers'Liberty sous le titre After Cronulla - solidarity against racism - but not "with Islam". Traduction par nos soins.