02 novembre 2007

Zozos, branquignols ...barbouzes ?

Petit à petit, miette après miette, le puzzle de l'affaire de l'Arche de Noé commence à dévoiler des faits à défaut de révéler l'entière vérité. Pour l'instant, on en est au stade des questions et des hypothèses.

1) D'abord, on a cette étrange ONG qui "agit clandestinement" selon Yama Rade, au point de solliciter (et d'obtenir !) des entrevues dans les ministères. Au point aussi de recevoir des mises en garde ministèrielles, toujours selon Yama Rade. Mises en garde non suivies d'effet car le grand chef de cette ONG aurait agi tel un gourou borné.

2) Soupçons ou preuves de trafic d'enfants pour réseau pédophile (tiens, l'accusation semble tombée en route ...), vols d'organes, fraudes à l'adoption, infractions à la législation sur le séjour et l'accueil des étrangers : la moindre de ces infractions aurait du entrainer une action des autorités en France. Alors pourquoi avoir attendu le dernier moment pour filer l'info aux autorités tchadiennes qui ont arrêté les membres de l'équipée sur le point de remplir l'avion d'un premier convoi d'enfants ? Pourquoi avoir laissé l'opération avancer jusqu'au point où des dizaines de familles d'accueil étaient rassemblées à l'aéroport de Vatry pour réceptionner des enfants (on les a vues à la télé, désapointées..) ?

3) L'ONG a joué sur une double identité. Le label "Arche de Zoé" en France, le sigle "Children Rescue" au Tchad. Et ce simple subterfuge aurait suffi à obtenir malgré tout une aide logistique de l'armée française. Merveilleuse armée française qui apporte sa modeste contribution à une ONG censée recevoir des mises en garde ministèrielles à Paris ! Bizare que dans une zone de tension, de conflit, où ces derniers mois l'armée française a été engagée dans des actions de soutien militaire au pouvoir tchadien, où la rivalité entre grandes puisssances autour de la crise du Darfour se joue aussi avec la panoplie complète des agents et des agences, il n'y ait pas de service de renseignements observant tout ce qui s'agite sous le soleil ...

4) Libération du 2 novembre écrit : "
Ce dernier [Idriss Déby] a aussi évoqué une complicité locale en s’étonnant, sur RFI, que le Boeing affrété par l’ONG ait eu la permission d’atterrir à l’aéroport d’Abéché, dont la piste est trop courte."
Or qui controle l'aéroport d'Abéché ? Qui a réalisé l'extension de la piste nécessaire à l'atterrissage du Boeing loué par Children Rescue/Arche de Zoé ?

De là à imaginer un sérieux problème de souveraineté du Tchad sur cette province... De là à se demander si les autorités tchadiennes n'ont pas fait preuve d'un zéle policier très large en arrêtant tous les protagonistes directs ou indirects de l'affaire (membres de l'ONG, journalistes, équipage de l'avion) justement parce qu'elles n'arrivaient pas à savoir qui était qui, et qui faisait quoi...dans ce qui est devenu un protectorat français.

5) Et Kouchner ? Avez-vous vu Kouchner ? D'habitude, l'humanitaire, c'est son domaine. Pourquoi Kouchner est-il absent et silencieux ? Pourtant, il bosse sur la mise en place de la grande Euroforce dirigée par la France qui est censée prendre position à coté du Darfour...

En attendant, les reportages sur l'origine des enfants regroupés par l'ONG sont édifiants sur la misère des populations locales. Ils montrent des parents qui n'hésitent pas trop pour faire le choix : entre l'incertitude de l'inconnu avec un maigre espoir d'aller dans une école et la certitude d'un sort quotidien misérable, la réalité fait pencher la balance d'une façon nette.

C'est aussi cela le bilan de la Françafrique. Plus de 40 ans après les indépendances, les anciennes colonies restent dans un état de dépendance politique et économique qui poussent les populations locales à tenter toutes les solutions, au risque de perdre ses enfants, au risque de perdre sa vie en affrontant les dangers du désert et des mers.